jeudi 30 décembre 2021

AU REVERS DU MONDE


Le monde se replie
comme les ailes
d'un rêve trop réel

rompu de l'aube
je reviens à moi
au-delà de l'abîme

le poids des abandons
le bilan des doutes
chassés par-dessus bord

la flamme survit
au creux du ventre

le temps nous laboure
sans plus de manières

l'incendie des corps
sculpte mon paysage

au revers du monde

nous nous fondrons
à l'appétit de vivre.




lundi 20 décembre 2021

RECETTES DE NOËL












Recettes de Noël

La neige en spectacle
avec les lampadaires
ça patine sur la bottine
le long des rues.

Après la pluie le froid

l'hiver
se souvient de l'hiver.

À l'étal des souvenirs
sans nostalgie
avec tendresse
me reviennent en mémoire
les hivers
de ma jeunesse.

À l'étal des souvenirs
j'ai retrouvé ce matin
des images saintes entre les pages
d'un vieux livre de recettes
de ma mère.


À goûter la neige...
à Martin et Louis

Les yeux qui brillent
il neige

étoiles qui dansent

sur la rétine du ciel
l'image se souvient
des enfants que nous étions,
la langue sortie,
les yeux qui brillent,

ces enfants que nous étions
à nommer la neige
avec des noms
inventés.


Denis Samson © 2021

Joyeux Noël etc.



lundi 13 décembre 2021

TANT DE RIVIÈRES

 











J'ai tant de rivières en moi
portées par la nuit

j'en ai une dans chaque main
chargée d'embâcles

avec elles, en elles
je me bricole un fleuve

et tout devient fracas
pour qui sait entendre

il existe une durée
où passent les ombres

je chasse la lumière
je m'ouvre des galaxies

le bar est ouvert
l'heure toujours joyeuse

j'habite une urgence
qui n'est pas pressée

car je navigue à vue.




mardi 7 décembre 2021

L'INFINI SERPENTE

 












L'infini serpente
arpente le non-lieu
le non-incarné

ses étranges musiques
surgies du passé
comme un poème de Denis Vanier
en pleine nuit froide
dans une cathédrale déserte

loin des promoteurs immobiliers carnassiers

loin des liturgies stériles

je vais indomptable

je contourne les pièges à rats
les étoiles mortes
pour mieux renaître.




lundi 22 novembre 2021

LA MORT DU CORAIL




















Quand l'ignorance devient
de plus en plus virale
comme une attaque de noirceur
quand la reconnaissance faciale
s'impose sous le masque
quand le baiser du feu à la terre
laisse des plaies ouvertes
sur l'avenir
il faut savoir saisir
chaque instant de clarté
au calendrier
d'une présence éphémère
à soi-même

chaque instant de clarté

jusqu'à la mort du corail.


Denis Samson © 2021


vendredi 12 novembre 2021

PEUT-ÊTRE L'AUBE

 












On achète
de la bière

on descend
à la rivière

le froid
s'insinue lentement
dans nos regards
mais on essaie
de pas trop voir
venir l'hiver.

Quand la nuit tombe
sans un mot
ton regard
traduit le mien...

Une journée comme un poème
dont la suite incertaine
sera peut-être l'aube.


Denis Samson © 2021


mardi 2 novembre 2021

MES PAS DANS MES PAS


 






















Il a neigé à contre-jour

mes pas dans mes pas
je laboure mon chemin

chaque aube laisse
une trace furtive
que je voudrais saisir
pour arrêter le temps

si tu es toujours là, près de moi
mes pas marcheront dans tes pas

nous irons faire l'amour
au cimetière du temps perdu

nous goûterons les
premières neiges
comme les dernières

et nous boirons
la flamme du jour.




jeudi 21 octobre 2021

PAYSAGE














Pour qu'un paysage se brise

il suffit parfois de peu

un vent froid venu du passé
un regard vers l'horizon

ou, sur une forêt
l'ombre des humains
qui avance sans coup férir

aux limites du silence
nos fissures parlent
nos cris se perdent

il nous faut déconstruire
les inutiles certitudes
vivre le splendide désarroi
du temps qui fuit sans nous.


(texte et photo)

vendredi 15 octobre 2021

ANTICHAMBRE

                  
                   Maïakovski 
(1915: Le nuage en pantalon)
















Étoiles en robe du soir
nuages qui dépassent
à l'ourlet d'un regard

sous la chaleur des paupières
dans l'antichambre aux fantômes
à huis clos sous le fard
d'étranges images se dévoilent.

La cervelle en veille
le modem en guise
de veilleuse
la nuit attend son heure.

La nuit
se souvient de tout.


Denis Samson © 2021


mardi 5 octobre 2021

ADOSSÉ AUX NUAGES
















Sous un ciel
d'un bleu élastique
la canopée chuchote
l'arbre
a mémoire du vent
la terre
tourne
déploie l'aubépine
en ses ombres.

Assis
au pied d'un arbre adossé
aux nuages
j'écris
en amont comme en aval
des heures.


Denis Samson © 2021


dimanche 26 septembre 2021

LA MIGRATION DES PRÉSENCES

 












Comme la mort de l'été
la migration des oiseaux
remplit mon ciel

tous ces départs sont
une ode fluide
un ballet aérien

leur absence en devenir
est en elle-même
une présence anticipée

je fais la conversation
avec l'ombre de mon père
qui aurait cent-quatorze ans

sa présence en absence
est une tendresse nouvelle

les absents savent nous parler
leur présence nous conforte

car dans la présence de l'absence
réside tout le mystère de l'amour.




samedi 18 septembre 2021

LA DERNIÈRE FOIS

...  À  P. R. 















La soirée était jeune
(à peine légale)
la première fois
quand on s'est rencontrés
dans ce bar.

La dernière fois
jusqu'à la fermeture
on a fait semblant
qu'on n'avait pas trop changé
partageant des souvenirs
et trinquant à la mémoire
d'ami(e)s disparu(e)s.

Récemment j'ai appris que tu étais mort...

Tu aimais vivre jusqu'à plus soif
et ensemble on a bu, parfois,
souvent jusqu'à pas d'heure.

Ce soir je bois à ta mémoire
pour l'amour des souvenirs
qui jamais ne meurent.


Denis Samson © 2021


jeudi 9 septembre 2021

VILLE ANIMAL

 












Comme un animal farouche
la ville a ses rythmes, ses odeurs

elle a besoin d'être apprivoisée
lentement, au fil des heures
des jours et des saisons.

La ville et moi dansons
un drôle de tango
depuis des âges

nous avons nos passions
nos mésententes

très loin entre ses néons
meurt la trace du soleil

elle est un monde, le reflet
de ce que nous sommes

son feu, dans mon âme
au creux des forêts.



Jean Coulombe ©  2021



samedi 28 août 2021

CAP AU NORD

 











Les vieux matelots roulent
en voiturette électrique
leurs jambes ont flanché
sous le poids du ciel

ils retournent au port
fêter la mort du jour
car la leur les hante

le nez cap au Nord
on dérive solide

plus le navire s'enfonce
plus on allume les feux

le capitaine philosophe
au péril de l'équipage

des étoiles plein la cale
l'horizon s'invite au bal

et les aurores boréales
leur dansent sur la tête...





dimanche 22 août 2021

AVEC LA LUNE AU SALON

 















Un samedi un peu ivre
le dictionnaire à coeur ouvert
sous la lampe
le corps en différé
comme un puzzle
avec un morceau en trop
la main
écrit gros,
arrondit les mots...

La lune se met à table
au salon
attend des invités
qui aiment aussi
briller,
brillant par leur absence.

À l'écran narcissique
sur le mur
les visages des miroirs
entre eux
se sourient.


Denis Samson © 2021


samedi 14 août 2021

LES ÉCLIPSES DU CORPS













Le corps a ses failles
on rallume sa roche

j'ai vu assez neiger
pour sentir la grêle

l'élégance du désespoir
qui éteint ses projecteurs

j'ai même une chambre de libre
pour la cérémonie des adieux

mais sans le savoir
le soleil cautérise
l'orgueil, ses plaies

et le temps passe
sans demander
son reste...




lundi 9 août 2021

EXTINCTION DES FEUX

À Jean et Alain 


Au crépuscule l'horizon
s'évanouit la lumière
se dissipe la mer
se détend.

Plus tard
à l'extinction des feux
l'âme échevelée
je regarderai
à nouveau
s'allumer les navires
avant d'aller sombrer
la bedaine à l'ancre
avant d'aller pointer
aux nuages
avant d'aller dormir
entre les lignes
d'un poème à finir.


Denis Samson © 2021


vendredi 30 juillet 2021

PAPILLON DE NUIT



 

On a tous un papillon
qui tourne en rond
sans fin

au plafond
de notre tête

au ciel
de notre vie

un papillon de nuit
ivre de lumière.





dimanche 11 juillet 2021

NOSTALGIE (REGARD JETABLE)

 
























La mémoire est un raccourci
à travers lequel
le temps se faufile
dans les décombres des saisons.

Avec une prédilection pour les ruines
le regard nostalgique
comme un Kodak en carton
où sont emballés des souvenirs
d'une époque jetable,
d'une époque
révolue,
trop souvent s'aveugle
à vouloir construire
sur du vent.

La mémoire avec le temps
se remplit de courants d'air.


Denis Samson © 2021


dimanche 4 juillet 2021

UN SOIR COMME ÇA

 





















un soir comme ça
il a rempli toutes ses poches
de poètes

il s'est couché
sur les roches
au fond du ruisseau

écouter le murmure
de leurs collisions
avec l'eau


Alain Larose © 2021


samedi 26 juin 2021

LE BLUES DE L'ÉPINETTE CROCHE

 






















L'épinette qui penche
a sa vie précaire
j'ai aussi la mienne

souvent au crépuscule
nous nous regardons,
toujours en silence

nous nous demandons
qui de nous
tombera en premier

demain ou dans une heure
la semaine prochaine
ou dans trente ans...

Les couleurs autour
peinent à nous réchauffer

elle brûlera pourtant
après sa chute
cette épinette

je la débiterai
et lui volerai sa chaleur,
si je suis toujours là

pour le moment,
elle se penche vers moi
comme je me penche vers elle

notre mort et notre vie
s'entrelacent

tout est calme.





mardi 22 juin 2021

EMBARGO

 
























Au supermarché des produits de l'esprit
où les vendeurs font des besoins
de nos désirs
de plus en plus
envahissante
la rectitude littéraire
impose un embargo
sur certains produits
de l'imagination.

Aux laboratoires d'insomnie,
le feu en sang
dans le satin des veines,
un noeud coulant au coeur,
écrire à poings fermés
c'est vouloir freiner
cette propagation du silence.



Denis Samson © 2021


samedi 12 juin 2021

LA DANSE DES INCONNUS

 

















Dans mon ermitage numérique
les oiseaux et leur amitié volage
composent des symphonies

le doute et la mémoire
sont mes chorales nocturnes

les voix se fondent
en satori sonore
avec le chant du ruisseau

tant d'inconnus intimes
ont traversé ma vie
sans que je les connaisse
vraiment...

Leurs visages flottent
emmêlés au sommeil

leur réalité et la mienne
facettes d'une même illusion
d'un même mystère

j'ai aussi traversé leur vie
sans jamais savoir danser.




mercredi 9 juin 2021

CLÉS DES CHAMPS

 
























Avec le double de la clé des champs
le ciel jeté sur l'épaule
avec chaque jour
un peu plus d'espoir
gagné sur les murs
les heures à bras-le-corps
dans une pétarade d'étoiles
au galop de l'horloge
l'éternité on est dedans.

On trouve pas toujours
ce qu'on cherche.

Peut-être qu'on cherche pas toujours
ce qu'on croit.


Denis Samson © 2021


samedi 29 mai 2021

MÉMOIRES D'UN PAYS

 

















Mémoire
d'instants frères
de saisons soeurs
de mêmes attentes

mémoire
d'un pays abstrait
aux musées de l'exil
aux musées de l'errance...

Mémoire
comme un puits
d'où s'évadent des fantômes,

cantiques et rafales de prières
l'odeur d'après-rasage d'un confessionnal
les habits du dimanche en famille

la courte-pointe et la soupe aux pois,

les idées d'un autre temps
tricotées serré
à ranger
aux musées en phentex,

Mémoire
d'un pays à venir.


Denis Samson © 2021


lundi 24 mai 2021

LA FROIDEUR DES COMPTOIRS BEAUTÉ

 



















J'ai un blues de pharmacie déserte
ses néons froids charcutant l'iris.

Coup de vieux au bout des présentoirs
sourire carnassier au rayon parfums

je suis le chemin de mon ombre sur les écrans

je transgresse les loteries pour du bonheur fantôme

je m'auto-inocule le fracas pour terminer cette course
au-delà des cendres qu'on nous réserve!




mardi 11 mai 2021

RIVES DU CIEL

 




















La nuit tombe
un naufrage de couleurs
sur les rives du ciel...

Une première couche d'obscurité
puis bientôt cette rumeur
de la mer au montant
dans le noir.

Au large des odeurs de la terre
la lune peint des mirages.


                ***

La mer jetée au vent
le brouillard se lève
les couleurs encore fragiles de l'aurore
laissent entrevoir
le squelette d'un navire
depuis longtemps
rejeté par les flots.


Denis Samson © 2021


jeudi 29 avril 2021

LE LABRADOR - 3

Lourdes-de-Blanc-Sablon 1972 












C'est un village qui sent bon
le pain chaud et le large

ses maisons sont des nids
où les oiseaux tricotent
les bribes du vent.

On y découpe la brume
à coups d'orages lointains

on y roule avec les galets
en embrassant la mer.

On y vit le temps qui passe
avec la patience des loups-marins.

Et l'on se chante parfois
les couleurs qui s'envolent,
comme dans un vieux film 8mm.

J'ai marché là tout le sentier,
toute la distance intérieure
jusqu'à l'autre en moi.




jeudi 22 avril 2021

OPTIQUES

 
























À la télé
le sang aboie d'une blessure
l'aube ressemble
à une exécution

les civières déraillent au triage

des autres candidats doivent quitter
Star Épidémie
grands moments d'émotion

le temps doux se poursuit
pas de précipitations en vue.

Virus médiatiques
en pleine mutation

à la télé la réalité
ne semble plus pouvoir
l'emporter sur l'image...

Miroir trompeur reflets
des apparences

l'illusion d'optiques objectives.



Denis Samson © 2021


vendredi 16 avril 2021

LE LABRADOR - 2






















Dans la baie de Red Bay
les cargos morts
montaient la garde

les aurores boréales
enfantaient le rêve.

Au bout de l'envol
je cabrais mes forces

dans ma tête, les tempêtes
d'une enfance à recoudre

la peau comme du cuir
le retour sera épines et sang.

Dans la baie de Red Bay
les brumes ont gardé trace...





mardi 6 avril 2021

NUIT (ET) JOUR





Crépuscule
sans soleil
nuit
écrite en secret sur les murs
en marge des trottoirs.

Matin
écrit à petits pas
d'oiseaux sur la neige
qui reste.

Soleil blanc lumière
froide.

Réalité
fragile

trottoirs aux jambes brisées
avec la pluie pour seul refuge.


Denis Samson © 2021


mercredi 31 mars 2021

LE LABRADOR

 

















Des cendres plein la bouche
comme un oiseau blessé

je n'avais d'amis
que mes frères de sang

les kapos de polyvalente
crachaient leur morale

les curetons et la police
me poussaient dans le dos

j'ai pris le large
ma chair au tonnerre

au bout de la route
le Labrador et ses glaces

à boire la mer
à tuer mon corps

j'ai défriché mon âme
j'ai soudé mes os.





mercredi 24 mars 2021

INTIMES JARDINS

 



















Éclosions automatiques
dans les méandres de soi
mots dont les songes sont la clé
rosiers peints aux ongles d'incendie

écrans de fumée
où sont projetés nos rêves

où se pavanent des étoiles

où nos blessures ouvrent l'oeil.


Denis Samson © 2021


jeudi 18 mars 2021

POUR LA ROUTE

 


Il faut savoir bien ajuster
son carburateur existentiel

faire le bon mélange
de désespoir et de sérénité

se faire des alliées
de la fureur et de l'extase

car la route est cruelle
les orages imprévus

rien ne nous prépare
à ce qu'on devine
depuis longtemps

quelques fleurs en plastique
au fond d'un jardin de granit

un ciel perdu où brûle
un soleil trop pâle.




lundi 8 mars 2021

ENTRE CHIEN ET LOUP






















Mon chien est parti
courir avec les loups

je me surprends encore
à brûler ses tendresses

sa folie de bête fourbue
qui s'arrache au jour
pour hurler sa nuit.

Comme mon chien parti au loup
tout me revient en écho...

Cette vie qui tarde à vivre
et qui me prend au ventre.




samedi 27 février 2021

 IN VINO VERITAS










(à un ami... perdu en mer)


Un bon petit vin
du dépanneur d'État...

Comme demain ce soir
comme hier
t'as pas les étoiles
en face des trous

du vent dans les voiles
le coeur patiemment
introduit dans une bouteille
tu navigues en solitaire.

In vino veritas...

Le vin joyeux renversé,
la beauté mise à nu,
on finit souvent seul.


Denis Samson © 2021



samedi 20 février 2021

FISSURES / brasier

 



La fuite des possibles

hante mes lendemains


un incendie éclate

au coeur de ma tête


Jean Coulombe texte ©

Vidéo : Jean Coulombe & Gilbert Sévigny ©



mardi 16 février 2021

FISSURES / latence








Dans l'intimité du chaos
un monde se meurt

on recouvre les feux
on moissonne le cristal

les folies ont l'élan des fureurs
les malades sont incurables

je traverse le poème vers la braise
l'ermitage de mes silences

un temps viendra
qui n'est pas encore venu
où le mystère reprendra ses droits.


Vidéo, réalisation: Jean Coulombe & Gilbert Sévigny

Tous droits réservés © 2021


jeudi 11 février 2021

DE SANG FROID LE GEL

 















Dans la maison du vent
le ciel à un clou se déchire

la lune un carreau brisé à la fenêtre,
le gel à bout portant,
il y a des feux qui dansent
parmi les braises du firmament.


Denis Samson © 2021